La face cachée de l’inceste
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Nous pouvons facilement désigner au sein d’un couple celui, et souvent celle, qui a subi l’inceste comme étant le problème du couple. Il est passionnant en tant que thérapeute du couple de se plonger dans le témoignage de Katouchka, thérapeute du couple et formée à l’Ecole du Couple. Son récit poignant nous fait non seulement entrer dans le monde d’une femme qui a subi l’inceste, mais aussi en quoi les hommes qu’elle rencontre et qu’elle tente d’aimer sont co-acteurs des vies de couple qu’elle veut construire, comment ils participent à une répétition ou une réparation de la violence subie, parfois malgré eux. Ses tentatives de constructions de couples, sont autant d’essais pour guérir d’une blessure d’abord indicible.
J’ai été profondément touché par la lecture de cet ouvrage paru dans la collection Récits de Vie. Chaque page révèle un effort pour nommer l’innommable, dénouer la puissance du sexe blessé par l’inceste qui empêche de vrais liens, et reconnaître sa dépendance au sexe et aux hommes. « Ca m’arrache » écrit à répétition Katouchka. Narration douloureuse de la quête incessante de son père, pourtant incestueux. Car il s’agit bien d’emprise et non de consentement.
On le sait : La violence de l’inceste est dans l’abus sexuel au sein de la famille, dans l’absence insultante de réaction de la mère ou de l’autre parent, mais sa face cachée réside dans ce désir lancinant pour le père, pour ce plaisir pris dont on ne peut jamais parler, car il est honteux, irreprésentable.
L’auteure a le courage de nommer ses combats pour retracer ses dépendances, ses effleurements avec la mort dans l’anorexie, des opérations mal menées, ou pour nourrir sa quête de sexe. Elle n’a pas appris les bons codes. L’amour, cet indispensable, a été entremêlé à l’impensable, l’intolérable. Elle raconte ses rencontres d’hommes qui pourront non seulement l’ouvrir au plaisir mais aussi à l’amour. Le couple devient alors un vrai terrain de restauration, souvent voué à l’échec.
J’ai aimé l’écriture tonique, parfois saccadée, toute à la première personne, où chaque page révèle une intensité de vie pour combattre l’intrusion subie, résister aux assauts de la maladie, mettre des mots de compréhension sur des actes intolérables et désirables, ou honorer le désir du sexe. Le travail d’écriture devient thérapeutique. Il permet d’oser être soi. Apparaître avec ses ombres parce que la lumière et la force de vie sont là qui permettent d’écrire, de se dire et d’ex-ister.
Ce livre est d’autant plus puissant pour nous thérapeutes, qu’il est écrit par une thérapeute qui sait raconter son cheminement de fille, de femme, de mère, avec ses contradictions, ses obsessions, ses désespoirs et sa rage de vivre. Sa lecture invite à un voyage tourmenté, intense, nourri de honte et de pudeur, d’interdits et d’aveux, de jouissance et de faux-semblants. C’est l’histoire d’un long cheminement pour exister et se faire reconnaître comme femme, libre. Bouleversant, d’autant plus pour le lecteur homme que je suis.